« A mon Père …»
Cette photo date
d'octobre/novembre 1939
et a été prise à Stelen.
2ème Chasseur à Pied IIIème
Bataillon 11ème Cie
Une partie de mon groupe
(peloton du Sous Lt Cuvelier Adj
Géradon, Sgt Maillard)
Debout (de g à dr) Vandamme (cl.35)
Caporal X, Catrain, Prévot, Caporal
Overstijns, Kinet (tué le 28/5/40),
Sgt Maillard (tous de la cl. 38),
Charlet (cl.35)
Je n'ai pas de souvenir des noms des
2 soldats accroupis.
La
nuit
du
17
au
18
mai
se
passa
sans
incident.
Au
petit
matin,
après
avoir
pris
un
peu
de
repos,
nous
reprîmes
notre
marche
entrecoupée
de
haltes.
Nous
étions
déployés
en
file
indienne
de
part
et
d’autre
des
routes
que
nous
empruntions.
Après
3
ou
4
heures
de
marche,
nous
étions
fatigués
et
non
ravitaillés,
notre
retraite
était
de
plus
en
plus
pénible.
Il
y
avait
déjà
un
ou
deux
soldats
du
groupe
qui
manquaient
à
l’appel.
La
colonne
éprouvait
toujours
plus
de
difficultés
à
se
remettre
en
route
après
chaque
halte
malgré
que
nous
craignions
tous
d’être
rattrapés
par
l’ennemi !
Vers
midi,
nous
arrivâmes
en
vue
d’
Alost
.
Nous
apercevions
des
fumées
épaisses
au
loin.
Pour
atteindre
Alost,
nous
devions
emprunter
une
route
à
découvert,
direction
Nord-Ouest.
C’est
là
que
nous
essuyâmes
quelques
coups
de
fusils
tirés
certainement
par
des
tireurs
isolés.
Il
ne
fallait
que
cela
pour
semer
le
désordre
dans
la
colonne.
Ce
fut
une partie de chacun pour soi indescriptible.
Nous
arrivâmes
malgré
tout
à
hauteur
d’Alost.
Tous
les
bâtiments,
toutes
les
maisons
étaient
en
feu
au
bord
de
la
Dendre.
Nous
devions
la
traverser
en
empruntant
un
pont
heureusement
intact.
Après
le
pont,
nous
entrâmes
directement
dans
la
ville
désertée
de
ses
habitants
qui
s’étaient
soit
réfugiés
dans
leurs
caves
ou
qui
avaient
évacué.
Nous
y
avons
de
nouveau
essuyé
quelques
coups
de
feu
qui
venaient
d’on
ne
sait
où.
Nous
ne
savions
pas
où
nous
devions
nous
placer
pour
nous
protéger.
Nous
sommes
restés
un
certain
temps
en
attente
à
la
sortie
d’Alost en dehors de la grand-route.
A
la
nuit
tombée,
nous
avons
logé
dans
des
granges,
sur
de
la
paille.
Nous
avions
faim.
Le
ravitaillement ne suivait guère…
Dans
la
journée
du
19
mai,
il
fallut
de
nouveau
se
remettre
en
route
pour
une
nouvelle
étape.
Dans
la
soirée,
nous
arrivâmes
dans
un
village
du
nom
de
Semmerzake
.
Nous
n’avions
aucune
notion
de
la
situation
de
ce
patelin.
C’est
quelques
jours
plus
tard
que
nous
apprîmes
que
nous
nous
trouvions
à
environ
1km
à
l’Est
de
l’Escaut.
Nous
devions
occuper
un
fortin
en
béton
en
avant
de
la
3ème
ligne
de
défense
que
constituait
l’Escaut.
Il
y
avait
bien
quelques
maisons
à
50
mètres
du
bunker,
mais
plusieurs
étaient
vides
de
leurs
habitants.
Sinon,
nous
n’avions
rien.
Nous
avions
abandonné
nos
bagages personnels dans une étable dans le village.
Nous
sommes
restés,
isolés,
pendant
cinq
jours
dans
ce
fortin.
Le
lieutenant
passait
une
fois
par
jour
pour
nous
encourager.
Une
corvée
allait
chercher
la
nourriture
au
PC
de
la
Compagnie
qui
se
trouvait
à
150 m de l’endroit que nous occupions.
Parlons
de
et
endroit
duquel
nous
surveillions
une
route
où
personne
ne
passait,
endroit
au
bord
de
cette route bordée d’un côté d’un bois,
de
l’autre
d’une
prairie
en
monticule.
Nous
aurions
pu
être
attaqués
de
tous
côtés
avant
d’avoir
espéré
faire un geste de défense !!
Nous
étions
donc
coupés
de
tout,
sans
aucune
nouvelle,
sauf
les
bobards
que
les
hommes
de
corvée
avaient
appris
lors
de
leurs
missions.
C’est
bizarre,
mais
vivre
ainsi,
en
dehors
de
tout,
nous
avait
fait
perdre
la
notion
du
temps
qui
passe
…
Nous
étions
encore
dix,
nous
avions
perdu
trois
unités
depuis
le
début
de
la
guerre,
surtout
entre
Vilvorde
et
Alost.
Le
24
mai
au
matin,
vers
8
heures,
nous
recevions
l’ordre
de
nous
apprêter
pour
une
nouvelle
étape.
Nous
marchâmes
jusqu’au
PC
de
la
Compagnie
et
après
rassemblement,
nous
reprîmes
notre
marche.
Toujours
le
même
scénario
:
en
file
indienne
de
part
et
d’autre
de
la
chaussée.
Nous
longions
l’Escaut.
Au
premier
pont
rencontré,
on
nous
fit
traverser
le
cours
d’eau, direction l’ouest.
En
ce
qui
me
concrne
(
je
ne
vous
ai
pas
encore
parlé
beaucoup
de
moi
),
j’étais
très
mal
en
point
car
je
souffrais
de
dysenterie.
A
tout
moment,
je
devais
m’arrêter,
j’étais
malade,
je
me
traînais.
A
bout
de
force,
je
fus
obligé
d’abandonner
mon
groupe.
Je
fus
recueilli
par
une
unité
de
ravitaillement.
Je
montai
dans un camion et fourbu je m’endormis.
Lorsque
je
me
réveillai,
j’étais
dans
une
grande
salle.
On
me
dit
que
j’avais
dormi
une
journée
entière
!
On
me
soigna
et
je
mangeai.
J’étais
au
milieu
de
soldats
que
je
ne
connaissais
pas,
mais
francophones en majorité.
J’essayai
de
questionner
pour
me
renseigner
sur
l’endroit
où
je
me
trouvais.
Les
réponses
que
j’obtins
étaient
méfiantes,
évasives.
Me
prenait-on
pour
un
espion
?
Une
chose
était
certaine,
là-bas,
on
ne
manquait
de
rien.
On
ne
mangeait
pas
mal
et
on
pouvait se reposer calmement.
J’avais
fait
part
de
mon
intention
de
rejoindre
mon
unité.
On
me
le
déconseilla
en
me
disant
d’attendre
encore
un
jour
que
je
sois
bien
guéri.
Le
lendemain,
c’était
un
dimanche,
vers
8
ou
9
heures
du
matin,
nous
fûmes
arrosés
de
bombes
incendiaires.
Aucune
de
celles-ci
n’atteint
la
salle
où
j’étais.
Heureusement,
mais
nous
nous
demandions
si
cela
n’allait
pas
recommencer...
Je
dirai
«ma
campagne
des
18
jours»
parce
qu’elle
est
spéciale.
Ce
matin
du
10
mai
égrena
ses
heures
sous
un
soleil
bienfaisant.
Nous
attendions
les
instructions.
Elles
arrivèrent
au
début
de
l’après-midi
:
nous
devions
rejoindre
la
route
qui
menait
à
Ninove
et
nous
placer
de
part
et
d’autre
de
la
chaussée
le
plus
possible
à
l’abri
des
regards.
C’est
là
que
nous
eûmes
la
surprise
de
voir
passer
devant
nous
quelques
véhicules.
C’étaient
des
voitures
tout
terrain
à
déplacement
rapide,
chargées
de
soldats
britanniques.
Ce
seront
d’ailleurs
les seuls que nous verrons durant les 18 jours.
Nous
attendions
camouflés
au
bord
de
la
chaussée.
Nous
vîmes
apparaître
au
loin
des
autobus
(tous
les
mêmes,
il
s’agissait
d’autobus
de
la
région
bruxelloise
surmontés
de
pancartes
publicitaires).
On
nous
fit
embarquer
dans
ces
véhicules
et
nous
voilà
partis
pour
une destination inconnue.
La
colonne
roulait
prudemment
et
lentement.
Bientôt,
la
nuit
tomba.
Nous
n’avions
aucune
idée
de
l’endroit
où
on
nous
emmenait
ni
des
évènements
qui
se
passaient
sur la première ligne de défense.
Notre
périple
prit
fin
pendant
la
nuit.
On
nous
débarqua
à
Wespelaar
.
Nous
étions
à
l’orée
d’un
bois
avec
devant
nous
des
pâturages.
Ce
n’est
que
le
matin
que
nous
aperçûmes
au
loin
les
premières
habitations
:
elles
étaient
au
moins
à
300
mètres.
Le
lieutenant
qui
nous
avait
désigné
l’emplacement
que
nous
devions
occuper,
nous
avait
donné
les
objectifs
à
particulièrement
surveiller.
Ensuite,
nous
avions
construit un abri avec des branchages.
Pend
ant
les
trois
premiers
jours,
il
ne
se
passa
rien.
Mais,
de
temps
en
temps,
on
entendait
au
loin
gronder
le
canon.
Sinon,
aucune
nouvelle
ne
filtrait
sur
la situation des belligérants.
Un
beau
matin,
nous
reçûmes
la
visite
d'un
aumônier.
Il
était
accompagné
par
l'ordonnance
du
lieutenant.
Il
bénit
le
groupe
et
donna
la
communion
à
ceux
qui
le
désiraient.
La
nuit
tomba.
L'artillerie
se
mit
à
tirer.
Cela
n'arrêta
pas
durant
toute
la
nuit.
On
entendait
les
feuilles
trembler
au-dessus
de
nos
têtes
à
chaque
passage
d'obus.
Cela
ne cessa qu'à l'aube.
Pendant
la
nuit,
j’avais
été
envoyé
en
patrouille
avec
deux
hommes
pour
inspecter
ce
qui
se
passait
devant
nous.
On
nous
avait
donné
un
mot
de
passe.
Nous
avions
marché
trois
cents
mètres
lorsque
nous
rencontrâmes
un
militaire.
Il
ne
connaissait
pas
le
mot
de
passe
!
On
ne
le
lui
avait
pas
donné
!
Il
nous
renseigna
sur
le
chemin
à
suivre
pour
nous
rendre
aux
barrières
de
protection
qui
avaient
été
construites
pendant la mobilisation.
Nous
avons
marché
un
bon
bout
de
temps
en
inspectant
à
gauche,
à
droite
dans
le
noir.
Nous
n'avions
rien
remarqué
d'anormal.
Je
décidai
donc
de
rebrousser
chemin
et
de
rejoindre
notre
poste
de
défense. Je pus enfin dormir un peu.
La
journée
suivante
se
passa
calmement.
De
temps
en
temps,
on
entendait
des
rafales
d'armes
automatiques,
des
tirs
d'artillerie
et
le
passage
d'avions
haut
dans
le
ciel.
Au
crépuscule,
les
tirs
d'artillerie
reprirent
comme
la
nuit
précédente.
Mais
au
milieu
de
la
nuit,
je
fus
réveillé
par
le
lieutenant
qui
m'avertit
que
nous
devions
décrocher
et
aller
rejoindre
une
grand
route
pas
très
éloignée.
Nous
abandonnâmes
de
suite
notre
position
et nous rendîmes au lieu indiqué.
Nous
étions
à
peu
près
les
derniers
à
rallier
le
lieu
de
rassemblement.
La
colonne
regroupée,
nous
partîmes
immédiatement
partagés
en
deux
files
de
part
et
d’autre
de
la
chaussée.
On
avait
beau
questionner
les
supérieurs,
c’était
au
compte-goutte
qu’on
nous
répondait. Nous battions en retraite, évidemment.
La
troupe
sans
bruit
marchait,
marchait.
Le
commandant
et
les
lieutenants
portaient
leurs
hommes
et nous incitaient à nous dépêcher.
Nous
arrivâmes
à
hauteur
de
Vilvorde,
au
canal
de
Willebroek
.
Quelques
gendarmes
nous
firent
courir
pour
traverser
le
canal.
On
nous
disait
que
d’ici
quelques
minutes,
le
pont
sauterait.
Quelle
débandade
!
C’était
inimaginable.
Je
vois
encore
la
cuisine
et
le
matériel
tirés
par
des
chevaux
au
milieu
du
pont.
Pauvres
bêtes
!
Elles
se
demandaient
certainement
ce
qu’on
leur
voulait,
pourquoi
on
les
obligeait
à
courir
pour franchir ce pont.
Après
cette
péripétie,
nous
reprîmes
notre
marche
pendant
quelques
kilomètres
en
direction
d’Alost.
A
un
moment
donné,
on
arrêta
la
colonne.
C’est
là
que
je
me
rendis
compte
que
c’était
la
débâcle
!
Des
unités
entières
passaient
à
côté
de
nous,
fuyant
vers
l’ouest,
encore
plus
en
désordre
que
nous
ne
l’étions.
Nous
commencions à être très démoralisés…
Après
cette
halte
de
deux
heures
au
moins,
nous
nous
étions
un
peu
reposés.
La
colonne
se
remit
en
route
vers
l’ouest.
On
marchait
quelques
centaines
de
mètres,
on
s’arrêtait
et
on
se
couchait
là
où
nous
ne
pouvions
pas
être
vus.
Après
quelques
instants,
on
se
remettait en route.
C’est
vers
six
heures
du
soir
que
l’on
s’arrêta
pour
de
bon.
Nous
apprîmes
qu’un
bataillon
avait
été
désigné
pour
rester
en
arrière-garde
afin
de
protéger
notre
retraite.
Je
reprenais
peu
à
peu
des
forces.
Il
faisait
toujours
aussi
beau,
et
le
27
mai
au
matin,
je
décidai
de
tenter
de
rejoindre
mon
unité.
Je
suis
donc
reparti
avec
armes
et
bagages
pour
l’aventure.
Je
me
dirigeai
vers
l’Est
où
on
entendait
des
coups
de
feu.
Je
n’ai
plus
aucune
idée
des
kilomètres
que
j’ai
pu
marcher.
En
cours
de
route,
je
rencontrai
des
militaires
isolés
qui,
comme
moi,
essayaient
de
rejoindre
leur
unité.
Je
les
questionnai
pour
savoir
s’ils
ne
pouvaient
pas
me
renseigner,
mais
peine
perdue.
Je
vis
en
chemin
des
détachements
d’artillerie
avec
quelques
pièces
mises
en
batterie
avec
des
tas
d’obus
à
proximité.
On
m’y
apprit
que
des
Chasseurs
à
Pied
se
trouvaient
à
quelques
kilomètres
en avant, tout cela sans trop de précision.
Je
continuai
donc
toujours
en
avant,
avec
l’espoir
de
rencontrer
des
militaires
de
ma
division.
Je
marchai
au
moins
jusqu’à
midi
quand
je
fus
renseigné
sur
l’endroit
où
se
trouvait
le
2ème
Chasseur
à
Pied.
Je
me
dirigeai
vers
l’endroit
qu’on
m’avait
désigné
et
à
un
moment
donné,
on
me
montra
où
je
devais
me
rendre
exactement
pour
rejoindre
ma
Cie.
Vers
deux
heures,
j’étais au PC. J’appris ainsi que j’étais arrivé à
Nevele
.
Le
Commandant,
les
lieutenants
et
le
personnel
administratif
de
la
Cie
se
trouvaient
là
.
Je
fus
reçu
comme
un
faux
frère
qui
avait
abandonné
ses
amis.
Mieux,
si
je
n’étais
pas
rentré,
j’aurais
été
renseigné
comme
déserteur.
J’avais
beau
expliquer
mon
cas,
rien
n’y
fit
!
On
me
donna
l’ordre
de
suivre
l’ordonnance
du
lieutenant
qui
allait
se
charger
de
me
mettre
sur
la
route
pour
rejoindre
mon
groupe.
Je
suivis
les
instructions
reçues
et
une
dizaine
de
minutes
plus
tard,
j’avais
réintégré
mon
peloton
qui
avait
pris
position
dans
un
champ,
pas
trop
mal
protégé,
ce
qui
permettait
de
voir
ce qui se passait à l’avant.
De
temps
à
autre,
des
shrapnels
explosaient
au-
dessus
de
nos
têtes,
entraînant
la
dispersion
de
fumée
noire
suivie
d’une
pluie
de
cendres
qui
s’abattait
heureusement
sans
dommage
sur
nous
et
aux
alentours.
Cela
dégageait
une
odeur
désagréable.
Nous
nous
demandions
ce
qui
allait
finir
par
nous
tomber
sur
la
tête
et
pourtant,
autour
de
nous,
rien
ne
bougeait.
On
ne voyait rien !
Vers
16h30,
sur
notre
droite,
des
coups
de
feu
retentirent,
puis
au
loin
des
cris
sauvages
comme
si
on
se
battait
puis
on
implorait
la
pitié.
C’est
à
ce
moment-là
que
l’ordonnance
du
lieutenant
nous
intima
de
rentrer
d’urgence
au
PC
de
la
Cie.
On
prenait
les
précautions
nécessaires.
Lorsque
nous
y
arrivâmes,
les
cuisines
et
les
charrettes
du
convoi
étaient
déjà
parties.
La
Cie
se
mit
en
route
comme
toujours
en
file
indienne
sur
les
2
côtés
de
la
route.
Cela
n’allait
pas
très
vite.
En
chemin,
nous
apprîmes
que
la
10ème
Cie
qui
était
sur
notre
droite
s’était
rendue
et
était
faite
prisonnière.
On
marchait,
marchait
à
cadence
moyenne,
avec
des
arrêts
fréquents
dus probablement à ce qui se trouvait devant nous.
A
la
nuit
tombante,
nous
fûmes
continuellement
harcelés
par
des
tirs
d'artillerie
qui
heureusement
ne
nous
atteignaient
pas.
Notre
marche
devenait
de
plus
en
plus
lente,
nous
nous
arrêtions
de
plus
en
plus
fréquemment.
Les
soldats
échangeaient
des
paroles
qui
devenaient
de
plus
en
plus
pessimistes,
se
demandant
où
on
nous
emmenait.
Nos
chefs,
Commandant
de
Cie
en
tête,
n’étaient
pas
très
loin
de
nous,
et
comme
nous,
ils
étaient
dans
l’enfer.
Lorsqu’on
faisait
quelques
pas
dans
le
noir,
si
on
entendait
le
bruit
des
obus
approcher,
vite
on
se
couchait
visage
contre
terre
sur
les
bas
côtés
du chemin.
On
aurait
dit
que
les
tirs
d’artillerie
étaient
de
plus
en
plus
nombreux
au
fur
et
à
mesure
que
l’on
avançait.
Certains
obus
éclataient
pas
bien
loin
et
on
entendait
les
débris
retomber
sur
nous,
certains
soldats
se
plaignaient
d’avoir
été
touchés.
On
n’avançait
que
très
lentement
et
nous
nous
arrêtions
souvent
:
cela
permettait
à
certains
de sommeiller un peu.
Dans
la
nuit
noire,
des
consignes
avaient
été
données
de
ne
pas
allumer
d’allumettes
et
de
parler
le
plus
bas
possible
pour
ne
pas
nous
faire
repérer.
Au
loin,
nous
entendions
une
cloche
sonner
les
douze
coups
de
minuit.
Nous
n’avions
aucune
idée
de
l’endroit
où nous nous trouvions.
Combien
de
temps
se
passa
ainsi
?
Je
ne
peux
le
dire.
Mais
heureusement,
les
tirs
d’obus
devinrent
moins
nombreux.
On
put
avancer
plus
sûrement,
mais
la
troupe
était
fatiguée
après
une
telle
nuit.
Après
un
temps
plus
où
moins
long,
on
nous
fit
arrêter.
L’artillerie
ne
tirait
plus
que
très
sporadiquement.
Le
lieutenant
vint
nous
rassembler
et
nous
emmena
dans
un
pâturage
au
bord
d’une
route.
Il
nous
donna
des
emplacements
à
occuper,
à
aménager
et
avec
un
objectif
bien
déterminé
à
surveiller.
Je
fis
le
tour
du
groupe
:
il
y
avait
encore
une
unité
en
moins.
Le
lieutenant
retourna
au
PC.
Parmi
nous,
exténués,
plusieurs
soldats
dormaient
pendant
que
les
autres
commençaient
à
faire
des
trous
avec
les
pelles d’infanterie dont on disposait.
Le
jour
commençait
à
se
lever.
Nous
vîmes
alors
le
lieutenant
se
diriger
vers
nous
pour
nous
annoncer
que
six
corps
gisaient
inanimés
au
beau
milieu
de
la
route.
Il
croyait bien que parmi eux, il y avait son ordonnance.
Nous
allâmes
sur
place.
Le
spectacle
était
abominable.
Les
six
corps
étaient
étendus
au
milieu
du
chemin,
les
vêtements
déchirés,
mutilés
dans
leur
chair,
une
chose
inoubliable
!!
Tous
les
six
avaient
été
tués
sur
le
coup.
Un
obus
s’était
écrasé
au
milieu
de
la
chaussée
en
pavés.
Les
malheureux
avaient
eu
la
malchance
de
passer
par
là
au
moment
précis
de
la
chute
du
projectile.
Et
dire
que
c’était
certainement
un
des
derniers obus qui fut tiré ce 28 mai 1940 !
Nous
apprîmes
que
nous
nous
trouvions
à
Ruiselede
.
Des
tranchées
avaient
été
creusées
au
bord
de
la
route.
Nous
enveloppâmes
les
corps
séparément
dans
une
couverture
et
nous
les
enterrâmes.
Nous
plaçâmes
à
chacun
un
croix
fabriquée
avec
des
planches
et
y
écrivîmes
les
noms
de
nos
six
malheureux
compagnons.
Nous
étions
huit
pour
faire
cette
macabre
besogne.
Il
nous
fallut
presque
deux
heures
pour
avoir
terminé.
Le
lieutenant
nous
pressait
parce
que
nous
devions
rejoindre
ce
qui
restait
de
la
Cie
et
pourtant
on
avait
les
bras
et
les
jambes
coupés
après
ce
travail
si
pénible.
Comme
en
1914,
le
2ème
Chasseur
à
Pied
avait
encore
payé un lourd tribu à la guerre.
Nous
apprîmes
alors
que
l’armée
belge
avait
capitulé
à
4
heures
du
matin
et
que
les
armes
s’étaient
tues
sur
tout
le
territoire
et
tout
cela
sans
conditions.
Plusieurs
Compagnies
avaient
été
faites
prisonnières
entre
Vilvorde
et
Alost.
Nous
appréhendions
ce
qui
allait
se
passer pour nous.
Nous
avions
repris
notre
marche
à
l’aventure
en
commentant
la
fin
possible
des
six
braves
que
nous
avions
enterrés
et
en
essayant,
lorsque
nous
pouvions,
d’approcher
de
nos
chefs,
de
savoir
où
l’on
nous
conduisait.
Hélas,
leurs
réponses
étaient
toujours
aussi
évasives.
Nous
avions
marché
au
moins
deux
heures
quand
on
nous
fit
arrêter
un
long
moment.
Nous
commencions
à
avoir
faim
et
les
vivres
que
nous
pouvions
encore
avoir
en
réserve
diminuaient.
A
un
moment,
on
nous
apprit
que
nous
allions
nous
mettre
en
route
et
que
nous
allions
défiler
devant
les
soldats
allemands
et
que
nous
devrions
faire
ce
qu’ils
nous
demanderaient.
Effectivement,
nous
avions
marché
deux
à
trois
cents
mètres
lorsque
nous
rencontrâmes
une
colonne
motorisée
allemande
(quelques
motos
mais
surtout
des
side-cars).
Les
soldats
nous
enjoignirent
de
nous
défaire
de
nos
fusils,
de
nos
cartouches
et
de
les
jeter
sur
un
tas au bord de la route.
Nous
commençâmes
alors
à
défiler,
pas
fiers
du
tout,
à
la
file
indienne
devant
eux.
Nous
étions
examinés
chacun
des
pieds
jusqu’à
la
tête
pour
qu’ils
puissent
se
rendre
compte
si
nous
étions
réellement
inoffensifs.
Lorsque
nous
fûmes
entièrement
désarmés
et
que
nous
allions
de
l’avant,
je
crus
entendre
des
applaudissements
dans
les
rangs
ennemis.
Ces
soldats
savouraient probablement leur joie et leur supériorité.
Nous
nous
dirigions
la
tête
basse
vers
une
agglomération
où
nous
nous
arrêtâmes.
Nous
apprîmes
que
nous
étions
à
Aalter
.
Les
instructions
étaient
d’occuper
les
locaux
vides.
On
nous
amena
de
la
paille
et
nous
pûmes
nous
reposer.
Nous
ne
pouvions
en
aucun
cas
nous
éloigner
de
ce
cantonnement
où
nous
passâmes la nuit.
Nous
y
sommes
restés
5
ou
6
jours.
Nous
étions
tranquilles.
Le
ravitaillement
suivait
vaille
que
vaille.
Les
allemands
ne
nous
importunaient
pas.
On
ne
les
voyait
d’ailleurs
pas.
Le
3
ou
le
4
juin,
je
ne
me
souviens
plus,
nous
quittions
Aalter
pour
prendre
la
direction
de
Gand.
Des
sentinelles
allemandes
étaient
placées
au
bord
de
la
route
tous
les
100
mètres.
En
chemin,
nous
passâmes
devant
des
casernes,
des
écoles,
…remplies
de
prisonniers
belges.
Mais
en
réfléchissant
à
la
route
que
nous
empruntions,
nous
avions
l’impression
qu’on
nous emmenait en Allemagne !
Enfin,
dans
les
environs
de
Wetteren
,
on
nous
fit
arrêter.
Nous
occupions
des
étables,
nous
restâmes
là-
bas. Nous ne pouvions pas quitter les environs.
Le
7
juin,
on
nous
annonça
que
nous
allions
retourner
à
Charleroi.
On
fera
le
trajet
en
4
étapes.
Le
9
juin,
nous
étions
à
Enghien
lorsque
le
lieutenant
nous
délivra
nos
papiers
(laissez-passer
rédigé
en
Allemand
émanant
de
la
Kommandantur
de
Wetteren
nous
enjoignant
de
retourner
à
notre
domicile
et
de
retrouver
un travail le plus tôt possible).
A
Enghien,
nous
avons
pris
un
train
jusqu’à
Bruxelles.
Là,
nous
avons
sauté
dans
un
camion
qui
allait
charger
du
charbon
en
région
liégeoise
et,
arrivés
à
hauteur
de
Waremme
,
nous
avons
abandonné,
en
remerciant
le
chauffeur,
ce
camion.
Nous
nous
sommes
dirigés
vers
Momalle
avec
l’espoir
d’y
prendre
un
tram
vers
Statte
.
Nous
y
avons
rencontré
un
ancien
du
2ème
Chasseur
passé
pendant
la
mobilisation
au
5ème
Chasseur
à
Pied.
Il
était
rentré
chez
lui
depuis
plusieurs
jours
comme
d’autres
(de
Chapon
Seraing)
d’ailleurs.
Il
me
rassura,
aussi,
en
me
disant
qu’à
Antheit,
mon
village, il n’y avait pas beaucoup de dégâts.
Le
tram
arriva
enfin
!
Que
ce
trajet
me
sembla
long
!
Je
descendis
enfin
à
Petite
Wanze
(hameau
d’Antheit)
Un
voisin
qui
se
trouvait
sur
le
tram
prévint
mes
parents
que
j’allais
rentrer.
Ce
fut
la
joie
des
retrouvailles,
eux
qui
n’avaient
plus
eu
aucune
nouvelle
de
moi
!
Nous
étions
le
10
juin
1940
vers
six
heures
du
soir.
Alors,
commença pour nous, la vie sous l’occupation.
Ma campagne des 18 jours
CHEZ JEAN-LUC
Introduction,
hommage,
historique
40-45,
notion
de
combattant,
la
«drôle de guerre» …
Démobilisé après 17 mois de service
militaire, mon père est à nouveau mobilisé après 1 semaine de retour à la vie
civile … Et on se plaint !!
Mon
père
raconte
ce
qu’il
a
vu,
vécu,
ressenti
pendant
cette
période.
Et
je
pense
que
par
pudeur
il
n’a
pas
tout
écrit .
Des vidéos d’époque
Prévisions, webcams, radars, ….
Prévisions, webcams, radars, ….
Ces évènements ont eu lieu en
Belgique ou dans l’Hérault